Il n’était pas prêt …

Il n’était pas prêt.


Il n’était pas prêt à tout remettre en cause…Ses certitudes, ses convictions…Rien n’a pu résister…Au premier regard …Il a rendu les armes…Il n’était pas prêt.  

Après tant d’années…comme si c’était hier, son cœur s’est emballé, le temps s’est arrêté …Tout a disparu autour de lui  et, perdu dans les yeux et le sourire de sa bien-aimée , il s’est noyé au paradis. 


Son cœur en rêvait, le sentait, mais maintenant, il le sait. Il le vit. Il est réel. Ça y est !  

La réalité, cette réalité est plus belle que le rêve. Oui !

Soudain, tous les mensonges qui ont accompagnés sa vie se sont  effondrés. On lui a toujours dit que la vie ne peut dépasser le rêve, que la réalité ne peut être meilleure que la fiction.  

Il avait fini par accepter cette fatalité, que notre monde est imparfait, que l’idéal n’est pas de ce monde. Que l’amour est une affaire de raison et de compromis, que le cœur est inconscient et doit être maîtrisé. 

Au fond de lui, depuis toujours, un cri ne cessait de déranger la tranquillité de sa vie : une vie sans la folie du cœur n’est pas une vie. L’amour donne à la vie son sens, son charme et sa beauté. Mais ce cri a toujours été vaincu par la force de la réalité. 


Il n’était pas prêt à sentir en un instant l’intensité de toute une vie.


Ce que la science et la raison ne savent pas cerner, le cœur le vit et s’en nourrit. 


Son cœur en avait tellement envie. Son être en est désormais à tout jamais lié. 


Il ne saura jamais si ce jardin d’Eden est le pur produit de sa pensée ou il a vraiment existé en dehors de lui. 


Il ne saura jamais si les deux ont goûté à ce fruit de l’éternité…Si les deux ont apprécié les regards, les hésitations, les rires... Ce qui s’est dit et ce qui ne s’est pas dit…

Peut-être que… Comme souvent, son esprit l’a protégé en refusant d’entendre le son qui aurait pu le réveiller…

Dans tous les cas, ce qu’il a senti est vrai et personne ne peut le lui retirer…Et tant mieux s’il n’était pas prêt…

Si seulement il pouvait faire plus que la contempler…

Si seulement, dans ses yeux, elle pouvait voir le feu ardent qui l’encercle et le torrent d’émotions qui, de tout bord, l’envahit… 


Il a voulu l’écouter toute la nuit, toute une vie, toute une éternité.


Il a secrètement demandé au temps s’il pouvait ralentir, s’il pouvait juste partir et ne jamais revenir.


Mais le temps qu’il connaît si bien, a refusé. Tel un gendarme du bonheur a décrété : cette ivresse, ce rêve doux, ce moment de folie et de paix…Doivent s’arrêter.


La mélancolie qui attendait son tour, qui poussait derrière les portes du paradis a fini par l’emporter…

Il est temps de laisser partir sa vie.

Le cœur résiste à la tristesse qui se propage, il négocie un moment de paix avant de craquer et de laisser grandes ouvertes les portes de la citadelle…Aux armées de mélancolie et de nostalgie. 


Son dernier sourire, son dernier regard, ces derniers mots …Sont le dernier rempart…L’eau de la vie est encore plus sucrée et l’ivresse est à son sommet…Il n’était pas prêt…

Bientôt il sera tellement noyé que peu importe si sa citadelle finit par lâcher…

Comme dans un conte de fées, sa voiture était rouge… C’était écrit. 

Il est minuit… Et voir le coucher du soleil à minuit… Il n’était pas prêt.